Histoire de MAY : mayday ! mayday!
Bien souvent nos passagers avec qui la sympathie passait nous parlaient de leur vie, de leurs préoccupations, de leurs projets. L’ambiance de vacances ainsi que des hôtes sympathique et attentifs à leur bien être les incitaient à parler librement avec nous
En juillet 1989 May vint à bord avec ses parents, son frère et Martine, une de ses amies très proches. Je n’ai pas d’énormes souvenirs de ce groupe sinon qu’une très jolie amitié se noua entre May qui devait avoir 17 ans à l’époque et la grand-mère que j’étais. C’était une jeune fille spontanée qui parlait facilement, charmante, à l’aise, bien éduquée, un peu infantile bien que très raisonnable, élevée dans un cocon familial très chaleureux. Et pendant son séjour à bord, je lui avais appris à faire de la planche à voile. Elle avait adoré.

Au cours de ce séjour les parents de May m’apprirent qu’elle partait en septembre aux U.S.A. où elle vivrait dans une faille d’accueil pour poursuivre ses études.
Je ne sais pourquoi à l‘annonce de cette nouvelle je fus prise d’une angoisse terrible et d’une grande inquiétude pour May et dans la conversation avec ses parents je leur demandais s’ils n’étaient pas inquiets de la laisser partir, de l’éloignement, de la séparation qui pouvait être déstabilisante pour elle, en quittant la douce atmosphère familiale ; Elle était encore bien jeune.
Je ne sais pas pourquoi je sentais qu’il ne fallait pas que May s’en aille.
L’amitié ayant tissé des liens, May me fit la promesse qu’elle m’écrirait pour me raconter sa vie et effectivement deux mois après elle me donnait des nouvelles de son installation et entre autres confidences me disait que l’atmosphère de la famille d’accueil était tendue et quelle fuyait souvent cette ambiance
J’ai retrouvé le brouillon de la lettre que je lui ai envoyée, mais pas les siennes car quelques mois après je les avais adressées à ses parents en mémoire de leur merveilleuse enfant
Le 27 novembre 1989
Chère petite amie ,
Ta fidélité me fait infiniment plaisir et tes nouvelles, dans cette nouvelle lettre, m’ont rassurée sur ton intégration sur les plans de tes études et de tes amitiés ; mais elles m’inquiètent au niveau de ta famille d’accueil. Le manque de sérénité, ou tout simplement de calme rend certainement difficile à vivre le temps entre tes cours et les sports. Il n’est pas bon que tu sois obligée de fuir. N’est-il pas possible de trouver un autre nid maintenant que tu es sur place ? Tes parents sont-ils au courant de ces difficultés ?
Tu m’as semblé être une jeune fille sensible mais équilibrée, ne te laisses donc pas entamer par cette ambiance, en attendant les conseils de tes parents à ce sujet
Bravo pour les sports et je trouve que les Américains sont formidables, car ils n’ont pas peur d’avoir la tête et les jambes. En France lorsqu’on est intellectuel, il est malheureusement souvent bien vu de n’être que cela et pas un « physique ». C’est bien dommage c’est se priver de grandes joies et d’un grand équilibre.
Donc le théatre a commencé, et ton accent fait rire ! Dis-toi aussi qu’une fois assimilée la langue ,un petit accent est très charmant ; regarde le succès de Jane Birkin ou Petula Clarc en France etc. et le petit accent français, aux Etats Unis est tout aussi bien vu : pour preuve le succès de Maurice Chevalier (à l’énorme accent) et celui d’Yves Montand etc. Donc pas de problème ! Et si on rit de toi, tu ries avec les rieurs ; c’est le mieux, car si l’on rit de ses propres défauts (petits ) cela prouve que l’on a de l’humour, c’est une défense merveilleuse.
Et puis tant mieux car un certain Christie aura sûrement envie de parler encore mieux le français an compagnie d’une gentille et mignonne française ; j’en suis ravie !
J’espère, douce May , que ta prochaine lettre me racontera Thinks giving et Christmas.
Dans la suite de la lettre je lui racontais ce que nous avions fait comme voyages, Yves et moi depuis notre départ de Turquie.
Je n’ai jamais su si elle avait reçu cette lettre mais Martine, son amie m’a appris que May avait subi un accident terrible : elle avait été fauchée par une voiture, sa tête était allée cogner l’angle vif du trottoir causant une très grave fracture ouverte du crâne ; elle vivait encore mais dans un coma profond, sans doute irréversible. Son père était près d’elle aux USA et espérait pouvoir la ramener en France.
Ce sont les dernières nouvelles que j’ai eu d’elle.